Une dissolution improbable mais pas impossible

Une dissolution improbable mais pas impossible
Publié le 14 janvier 2025
Dans un contexte de chambre ingouvernable, le recours à de nouvelles élections législatives pourrait apparaître comme une solution évidente pour rétablir une majorité. Cependant, cette option comporte des risques politiques et institutionnels majeurs. Les acteurs politiques ont davantage d'intérêt à maintenir le statu quo.

Dans la France politique d’après la dissolution de juin 2024, les accords sont difficiles à trouver et l’on réalise que l’esprit de compromis, dont on pouvait espérer l’émergence dans un Parlement sans majorité, n’est pas pour demain. Pourtant, si on y regarde de plus près, un sujet semble faire consensus, de manière officieuse : personne ne veut ou n’a intérêt à une dissolution en 2025 ou 2026.

La dissolution de l’Assemblée nationale est prévue par l’article 12 de la Constitution, qui permet au Président de la République de mettre fin au mandat des députés et de convoquer de nouvelles élections. Cette décision, prise après consultation du Premier ministre et des présidents des deux chambres, est généralement utilisée en cas de blocage politique ou de majorité ingouvernable. En juin dernier, Emmanuel Macron a utilisé cet outil en espérant prendre de vitesse les députés qui, selon lui, auraient renversé le gouvernement à l’automne sur la question du budget.

Toutefois, dissoudre est un pari risqué puisque rien ne garantit que les nouvelles élections apportent une majorité plus stable. L’histoire montre des résultats contrastés : en 1962, De Gaulle a renforcé sa position mais, en 1997, Jacques Chirac a dû subir une cohabitation. Enfin, Emmanuel Macron a perdu sa majorité relative et déclenché une crise institutionnelle sans précédent.

Le texte constitutionnel établit qu’une nouvelle dissolution ne peut intervenir dans l’année qui suit les élections législatives. Une dissolution pourrait de nouveau être décidée qu’à partir de juillet 2025. En tout état de cause, indépendamment de la question de calendrier, une nouvelle dissolution risquerait d’amplifier le désordre, de renforcer les partis protestataires et d’affaiblir davantage la confiance des citoyens envers les institutions. C’est une arme institutionnelle puissante mais à double tranchant. C’est pourquoi, au fond, tant pour les groupes que pour les partis politiques, le Président de la République ou les électeurs, après une année 2024 instable, personne ne veut recommencer avant l’échéance de 2027.

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Comment expliquer que, face à cette impasse parlementaire, l’option du renouvellement électoral apparaisse finalement comme la moins bonne des options ?

Dans le cadre d’une nouvelle dissolution, se mêlent des questions vastes qui dépassent largement le cadre d’une simple élection législative.

Les partis veulent prendre le temps de construire

1. UDR : un parti trop jeune pour prendre des risques

Le jeune parti politique Union des Droites pour la République (UDR) et son groupe parlementaire ont besoin de temps et d’une exposition médiatique pour s’ancrer dans l’opinion publique. Son leader, Éric Ciotti, se concentre principalement sur sa candidature à la mairie de Nice en 2026 et n’a probablement aucune intention de repartir de zéro dès l’année prochaine. S’il devait perdre son groupe à l’Assemblée nationale, ce serait un désastre politique pour lui. En quittant Les Républicains, il a hérité de l’étiquette de « traître » en raison de son rapprochement avec l’extrême droite, rendant tout retour en arrière impossible. La seule option qui lui reste est donc de continuer à avancer.

Cette stratégie l’a, de facto, placé sous la dépendance du Rassemblement national, un parti bien plus solide, implanté dans les territoires et politiquement stable. En cas de nouvelles élections législatives, les candidats de Marine Le Pen auraient peu de difficultés à regagner un nombre significatif de sièges. En revanche, Éric Ciotti et son groupe, qui ne compte que seize députés – à peine plus que le seuil minimal pour constituer un groupe parlementaire –, risqueraient tout simplement de disparaître.

Un tel scénario signerait la fin de ses espérances politiques pour 2027. Pour l’instant, il conserve une capacité d’influence et peut peser dans les négociations, notamment si Marine Le Pen venait à accéder au pouvoir. Mais, sans groupe parlementaire, il serait politiquement inexistant.

Dans ce contexte, Éric Ciotti et son groupe ont tout intérêt à miser sur la stabilité et à préserver leur position jusqu’en 2027.

2. RN : Tout à perdre avant 2027

Pour le Rassemblement national, malgré les 143 députés obtenus lors des dernières législatives, le résultat a été une déception. Le parti, que beaucoup voyaient aux portes du pouvoir, a été stoppé net par le front républicain. Ce revers a démoralisé les militants, mis en lumière l’impréparation des candidats et montré que le prétendu « plan Matignon » n’était pas à la hauteur des ambitions affichées. Le RN a besoin de temps pour former ses cadres, renforcer son sérieux et continuer à épurer ses rangs afin de consolider son image.

Par ailleurs, le contexte judiciaire est une épée de Damoclès pour le parti. Le procès en cours, dont le verdict est attendu le 31 mars 2025, soit trois mois avant la première date possible pour une hypothétique dissolution, pourrait avoir des conséquences lourdes. Des condamnations, notamment à l’encontre de Marine Le Pen, semblent probables au vu des précédents pour d’autres formations politiques. Un tel scénario pourrait avoir un impact sur l’opinion publique, rendant une nouvelle campagne législative extrêmement périlleuse pour le RN.

Enfin, la conjoncture politique et économique ne plaide pas en faveur d’une prise de pouvoir précipitée. Pourquoi s’installer à Matignon en 2025 ou 2026, dans un contexte de chômage élevé et de crise économique, au risque de porter un bilan défavorable qui pourrait lourdement handicaper le parti à l’élection présidentielle suivante ?

Quant à Jordan Bardella, il a l’avenir devant lui et n’a aucun intérêt à se précipiter. Pour lui, l’objectif est clair : attendre 2027, avec l’espoir qu’une union républicaine contre Marine Le Pen au second tour puisse conduire à sa défaite. Aux yeux de certains, Marine Le Pen représente désormais un frein pour le camp dit « national », qui aspire à tourner la page et placer Bardella comme figure de renouveau. Dans ce contexte, il serait plus judicieux pour lui de faire preuve de patience et de loyauté, en laissant le temps jouer en sa faveur.  Une entrée précipitée en fonction, comme celle de Premier ministre en 2025 ou 2026, serait contre-productive. Avec la logique des blocs qui structure le paysage politique, son mandat serait vraisemblablement de courte durée, risquant un renversement rapide et une détérioration de son image.

En conclusion, bien que le RN puisse continuer à voter des motions de censure et à fragiliser des gouvernements, il est peu probable qu’il aille jusqu’à provoquer une dissolution qui ne servirait ni ses intérêts, ni ceux de Jordan Bardella.

3. LFI : pousser les socialistes à la faute pour rester le seul pivot de la gauche

Le parti poursuit sa tentative de respectabilisation depuis qu’il a obtenu des postes importants à l’Assemblée nationale, notamment au sein des commissions. Par ailleurs, La France Insoumise (LFI) se concentre activement sur la préparation des élections municipales de 2026. Des figures comme David Guiraud, Sébastien Delogu, Sophia Chikirou ou encore Antoine Vannier sont pressenties pour être candidats dans les principales villes de France. Cette stratégie traduit la volonté du parti de consolider son ancrage local.

Cependant, sur le plan politique, LFI doit faire face à la montée en puissance du Parti Socialiste. Ce dernier retrouve progressivement du poids et refuse désormais de se laisser dominer par Jean-Luc Mélenchon. Pour LFI, un affrontement direct avec le PS aurait des répercussions stratégiques importantes. Dans cette perspective, le parti verrait d’un bon œil que le PS prenne l’initiative de rompre l’accord du NFP, en se présentant, par exemple, contre Mélenchon en 2027.

LFI a tout intérêt à maintenir cette assemblée et cet accord, même s’il repose largement sur une fiction politique, jusqu’à ce qu’il puisse imputer à ses alliés la responsabilité de l’avoir brisé. Une telle situation leur permettrait ensuite d’accuser ces mêmes alliés de favoriser une victoire de Marine Le Pen en 2027, consolidant ainsi leur propre posture de parti pivot de la gauche.

4. PS : une résurrection qui doit se confirmer dans le temps

Le Parti Socialiste profite d’une dynamique positive, marquée par une nette progression de son nombre de députés. Alors qu’ils n’étaient que 31 en 2017 et 2022, en incluant les apparentés, ils sont désormais 66 en 2024, rivalisant presque avec La France Insoumise. De plus, le score de 14 % obtenu par Raphaël Glucksmann aux élections européennes est un signal encourageant pour le retour de la social-démocratie française sur la scène politique. Cependant, le PS a besoin de temps pour consolider cette remontée, retrouver une position centrale au sein de la gauche, et surtout identifier un candidat crédible pour la présidentielle de 2027.

Un autre enjeu majeur pour le parti est le congrès prévu en 2025, qui devra clarifier sa ligne politique. Les divisions internes sont visibles, avec des camps opposés déjà dessinés. Alors qu’Olivier Faure est sur une ligne de crête quant à la stratégie à adopter, François Hollande, Nicolas Mayer-Rossignol, Karim Bouamrane, Hélène Geoffroy incarnent les visages de la rupture totale avec LFI.

Les élections municipales de 2026 représenteront un défi considérable pour le PS, exigeant une mobilisation intense. Les socialistes prévoient une stratégie d’union de la gauche pour ces élections qui exclut LFI, ce qui les placera directement en concurrence avec des candidats de LFI dans plusieurs grandes villes.

Dans ces conditions, le Parti Socialiste n’a aucun intérêt à précipiter une dissolution de l’Assemblée nationale. Au contraire, il lui faut du temps pour poursuivre sa reconstruction, renforcer ses positions locales et affiner sa stratégie en vue des échéances nationales à venir.

5. LR : un retour aux affaires très court mais vital pour reprendre du souffle

Malgré la motion de censure qui a renversé le gouvernement, cette période sera perçue comme une résurrection pour le parti. Pour la première fois depuis 2012, des figures de la droite républicaine ont retrouvé des postes de premier plan, bénéficié d’une visibilité médiatique et travaillé à redorer leur image, renouant ainsi avec leur statut de parti de gouvernement.

Cependant, en interne, la situation reste profondément chaotique. Avec seulement 47 députés, en constante diminution, le parti fait face à des rivalités croissantes en vue de la présidentielle de 2027. Laurent Wauquiez, Bruno Retailleau, Xavier Bertrand et Michel Barnier s’opposent sur la direction à prendre, tandis que la récente scission menée par Éric Ciotti a mis en lumière un problème de fond : la difficulté des Républicains à définir une ligne claire et cohérente.

Pour sortir de l’impasse, seule une alliance durable avec les macronistes pourrait offrir une solution. Mais un tel rapprochement imposerait aux Républicains de renier leur ADN, les réduisant au rôle de supplétifs. Dans l’hypothèse de négociations avec le bloc central pour préserver des circonscriptions, l’actuel déséquilibre des forces rendrait LR perdant dans tous les cas.

Dans ce contexte, il semble plus judicieux pour le parti de maintenir le statu quo jusqu’en 2027. Cela leur permettrait de préserver ce qu’il leur reste de crédibilité et de se préparer à une éventuelle reconstruction, plutôt que de s’engager dans des compromis susceptibles de les affaiblir définitivement.

6. Un bloc central composé de micro-ambitions et qui n’a plus grand-chose d’un bloc

Au sein du bloc central, chacun sent qu’une page se tourne et que l’heure est déjà à l’anticipation de la suite. 

Du côté de Renaissance, la défaite de juillet dernier reste dans les esprits. Les députés, désillusionnés et se sentant trahis, agissent désormais de manière indépendante, sans attendre les directives des dirigeants. Leur nombre est passé de 99 en début de mandature à 93 aujourd’hui. Le macronisme n’a plus la dynamique qui le portait autrefois. Emmanuel Macron, quasi absent du jeu politique, n’a désigné aucun véritable successeur, et Gabriel Attal ne s’impose pas naturellement comme le leader de ce bloc. Après les revers des européennes et des législatives, il est peu probable que ce camp envisage sereinement une nouvelle échéance électorale à court terme. 

Au MoDem, la perte de 15 députés en juillet a été un coup dur. Le parti, désormais affaibli, redoute de retomber dans une longue période de marginalisation, comme celle vécue entre 2002, sous l’étiquette UDF, et 2017, avant son retour en force avec Emmanuel Macron. François Bayrou, chef vieillissant, semble davantage préoccupé par sa potentielle candidature pour 2027 et par la survie financière de son parti. Il n’a aucune envie de se relancer dans une campagne législative, surtout avec le risque très réel de voir son groupe centriste encore diminuer. 

Horizons, quant à lui, regarde résolument vers la présidentielle. Les députés de ce parti ont déjà affiché leur volonté d’émancipation du bloc macroniste et concentrent leurs efforts sur la préparation de la candidature d’Édouard Philippe. Une alliance automatique avec les autres composantes du bloc central, en cas de nouvelles législatives, est loin d’être acquise. Philippe lui-même avait été particulièrement contrarié par la dernière dissolution, qui avait perturbé ses plans soigneusement établis. À moins de deux ans de la présidentielle, où il figure parmi les favoris, il souhaite éviter à tout prix un nouveau scénario de ce type, qui pourrait se révéler bien plus déstabilisant pour son ambition. 

Enfin, deux données concernent tous les partis : les municipales de 2026 représentent un objectif prioritaire bien plus que les circonscriptions législatives. Et le système de financement public des partis, en grande partie lié au nombre de voix obtenues et de parlementaires rattachés, incite à la prudence. En 2024, l’aide publique globale s’élève à 66,43 millions d’euros, avec 1,61 euro versé par voix et 37 000 euros annuels par parlementaire. Ce système encourage les partis à préserver leurs effectifs et freine toute volonté de dissolution, surtout pour ceux qui risqueraient de perdre gros.

Le président est empêché par son impopularité et sa fin de mandat

Emmanuel Macron approche de la fin de son second mandat. En admettant qu’il se décide à dissoudre de nouveau, quel serait son intérêt ? Il avait 250 députés avant le 9 juin 2024, il n’en a plus que 162. Il n’a plus de majorité relative mais une minorité gouvernementale, ne commande plus ses troupes et n’a aucune marge de manœuvre. La chance d’Emmanuel Macron, dans l’épisode des législatives 2024, est qu’il n’a perdu « que », peu ou prou, 70 députés alors que les sondages promettaient une débâcle bien plus sévère. En cas de nouvelle dissolution, étant donné le contexte politique défavorable au « socle commun » macroniste et le rejet personnel dont fait désormais l’objet le président, il faudrait une conjoncture politique nouvelle pour que son camp ne soit pas davantage affaibli. Pour qu’il décide une nouvelle dissolution, il faudrait que le climat d’opinion change, avec un retour en grâce des partis de gouvernement et un affaiblissement des partis extrêmes. On ne voit pas pour le moment se dessiner un tel retournement de situation, même si l’affaiblissement de LFI et le début d’émancipation du PS et des écologistes envoient des signaux faibles de changement. Si le contexte politique ne changeait pas, il disparaîtrait totalement et encore plus brutalement qu’actuellement où, dans un singulier entre-deux, il arrive encore à placer des ministres de son camp dans des postes ministériels et à faire passer des messages.

Son impopularité atteint des sommets : 56 % de rejet et 76 % des sondés estimant qu’il est un mauvais président1. Dans ce contexte, une nouvelle dissolution ne ferait qu’aggraver la situation. Macron, soucieux de sa place dans l’histoire, sait qu’il doit soigner la fin de son mandat. La première dissolution était incompréhensible, comme il l’a reconnu lui-même, mais une seconde, perçue comme un acte désespéré, pourrait ruiner son autorité, même en politique étrangère. 

Il faut aussi penser à la suite. Il n’aura que 49 ans en 2027 et il pourrait très sérieusement envisager un retour politique, à l’image du « come back » de Donald Trump, en 2032 ou 2037. Pour préserver cette possibilité, il ne doit pas commettre l’erreur de détruire son capital politique, à l’instar de Jacques Chirac, qui a longtemps payé sa dissolution ratée de 1997. 

Enfin, sur le plan de la préservation des institutions, depuis juillet, Emmanuel Macron s’efforce de se repositionner en président « au-dessus de la mêlée », focalisé sur les affaires internationales et l’unité nationale. Une nouvelle dissolution serait perçue comme une manœuvre opportuniste, révélant des instincts de pompier pyromane et affaiblissant encore davantage les institutions. Il n’en sortirait que fragilisé, et son legs en pâtirait irrémédiablement. D’autant plus que rien n’indique dans l’opinion un changement d’ambiance qui permettrait d’envisager une expression électorale différente de la précédente.

Préserver nos institutions

Nos institutions ne sont pas conçues pour servir de terrain de manœuvres politiques hasardeuses. Envisager deux dissolutions en l’espace de quelques années, c’est prendre un risque majeur, d’autant plus que rien n’indique dans l’opinion un changement d’ambiance qui permettrait de l’envisager. De plus, les conséquences pourraient durablement affecter les électeurs et les usages institutionnels. Cela ne ferait qu’aggraver le malaise démocratique, déjà alimenté par un sentiment de déconnexion croissante entre les élus et les citoyens.

Depuis plusieurs années, notre système démocratique est mis à rude épreuve : verticalité du pouvoir, sentiment d’impuissance des élus, et citoyens convaincus de ne pas être entendus. Une étude récente rappelle pourtant l’attachement des Français à la démocratie et au modèle républicain. Mais l’image projetée par une classe politique jugée déconnectée ne cesse d’ébranler cette confiance, notamment parmi les plus jeunes ou les plus vulnérables de la société.

Les chiffres de l’étude IPSOS2 de l’automne dernier sont alarmants : 51 % des Français pensent qu’un « pouvoir fort » est nécessaire pour garantir l’ordre et la sécurité, 23 % jugent que la démocratie n’est pas le meilleur système, un chiffre qui grimpe à 31 % chez les moins de 35 ans. Par ailleurs, 68 % estiment que l’économie favorise avant tout les riches, et 57 % accusent les dirigeants de ne pas se soucier des autres catégories sociales. Dans un tel contexte, jouer avec les institutions et convoquer les électeurs à répétition revient à envoyer un message destructeur : celui que leurs choix ne comptent pas vraiment et qu’ils doivent revoter jusqu’à ce que le résultat convienne.

Pourtant, les élections législatives de 2024 ont vu une participation significative : 67 % des électeurs se sont déplacés, un chiffre bien supérieur aux 47 % de 2022 ou aux 42 % de 2017. Cette Assemblée a donc une légitimité renforcée. Si ces choix sont balayés à nouveau, les électeurs auront le sentiment d’être trahis, alimentant un peu plus la fatigue démocratique et la défiance envers les institutions.

Une potentielle future dissolution est un épouvantail qui ne devrait, raisonnablement, pas être utilisé un d’ici 2027. La nouvelle sociologie électorale induit une tripolarisation qui, selon toute vraisemblance, sera durable. C’est pourquoi Macron, qui l’a utilisée une fois, ne peut pas se risquer à tenter ce pari une seconde fois, puisque les chances de revenir dans la même configuration sont très grandes. 

Aussi, les partis et groupes politiques n’ont pas non plus envie d’un tel scénario. Tout le monde a intérêt à rester dans ce statut quo, que ce soit pour des raisons financières, d’ambitions présidentielles, de survie politique ou des hésitations sur les lignes idéologiques à adopter. Ajoutons que le travail demandé pour une campagne législative est gigantesque et le risque de perdre encore plus. Chacun se complait dans une situation bloquée qui permet de préparer la suite et de réfléchir à comment s’organiser dans la future configuration politique.

Enfin, plus important encore, les électeurs sont lassés et risquent d’encore plus s’éloigner de la politique si on venait à leur redemander, déjà, de voter. C’est la plus sérieuse des menaces, sur le long terme et dans les esprits, pour notre démocratie.


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Yoann Taïeb