En finir avec l’exclusion culturelle française

En finir avec l’exclusion culturelle française
Publié le 6 février 2024
Malgré les efforts de la décentralisation, le maillage territorial des institutions culturelles, les efforts pour le renouvellement des publics, la démocratisation culturelle reste un rêve inachevé. Les créateurs eux-mêmes n’ont-ils pas une responsabilité dans ce cloisonnement social, en préservant un entre-soi élitiste, à l’abri des certitudes d’une culture subventionnée ?
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« S’il est vrai que dans les spectacles que nous écrivons, que nous mettons  en scène, que nous produisons et auxquels nous assistons, nous avons le désir de montrer la violence du monde et la manière avec laquelle ce monde broie les plus fragiles d’entre nous, il nous faut bien réaliser que ceux-là que nous nommons ennemis et qui votent pour le repli, le rejet et le nationalisme, sont précisément les enfants, les frères, les sœurs, les parents, de ces personnages  que nous prétendons défendre. »

-Wajdi Mouawad, Ode à l’ennemi, Manifeste 2017-2018 de La Colline – théâtre national

En 2023, la baisse et la suppression de subventions par la Région Auvergne-Rhône-Alpes à plusieurs établissements culturels a ému une partie de la classe politique nationale et le milieu artistique et culturel. Cet assaut inédit contre la culture subventionnée de la part de Laurent Wauquiez, le président de la Région, membre d’un parti de gouvernement, a ouvert en France une brèche populiste d’un nouveau genre, qui mérite un examen approfondi. La Région, contrainte de s’expliquer, a invoqué après coup un rééquilibrage territorial des subventions, qui n’a pas été pour l’heure opéré. Une justification qui ne trompe personne et qui nous oblige à comprendre les racines du malaise. Pour le dire autrement : supprimer des subventions à la culture est désormais un argument électoral en France, et cela risque de s’étendre à d’autres territoires et à d’autres échelles. S’offusquer à coup de tribunes dans la presse ne suffira pas. Il faut lever le voile sur l’impasse du système artistique et culturel subventionné français.

Une crise larvée de la culture subventionnée

La culture en France arbore une bonne santé de façade avec une augmentation du budget du ministère de la Culture (4,2 milliards d’euros en 2023 soit +7% par rapport à 2022), l’ouverture de nouveaux équipements en régions (2023 a notamment été marquée par l’ouverture de la Cité internationale de la langue française à Villers-Cotterêts) et une fréquentation soutenue des grandes institutions culturelles: l’exception culturelle bat son plein. Ce grand totem conceptuel, érigé en fort imprenable, est admis comme un des principes directeurs de la République. La conception sacrée de la culture française s’est institutionnalisée jusqu’à se patrimonialiser, la rendant par la même occasion difficile à critiquer ou à remettre en question. Dans le même temps, le discours politique sur les arts et la culture a été relégué au second plan, la culture n’étant ni un sujet de société, ni un axe de campagne électorale. Les accents émancipateurs du discours culturel ont, pour leur part, quasiment disparu.

Depuis la création du ministère de la Culture en 1959, la grande idée d’une politique culturelle française (à distinguer des politiques publiques de la culture), selon laquelle la culture serait le catalyseur d’un projet de société a perdu en intensité, jusqu’à disparaître des ambitions politiques des ministres de la Culture successifs. Progressivement, c’est une conception patrimoniale, marchande, voire libérale de la culture qui s’est installée avec des politiques publiques de filière, de soutien aux industries créatives ou encore de plateformisation de l’offre culturelle avec le pass Culture. Cette déprise de l’idée d’une politique culturelle, doublée de l’institutionnalisation de certains secteurs de la culture, semblent avoir modifié la manière dont les acteurs culturels se politisent. L’engagement de ceux-ci reste fort sur certains sujets de société, la question des violences faites aux femmes a par exemple pris une place importante dans le débat public ces dernières années avec #metoothéâtre, les polémiques autour des César, ou plus récemment sur les agissements de Gérard Depardieu. En revanche, la mobilisation se fait plus discrète en direction des conflits sociaux, la réforme des retraites n’a par exemple pas été marquée par un engagement significatif du monde de la culture. Dans le secteur subventionné, qui nous intéresse plus particulièrement ici, les institutions, les festivals et les œuvres affichent des ambitions politiques qui ne se résument souvent qu’à un discours sur des thèmes de société entraînant une politisation de façade.

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La démocratisation culturelle est l’autre grand projet politique en perte de vitesse. Une ambition louable qui a longtemps été le corollaire de la décentralisation et de la politique de mise à disposition des œuvres sur tout le territoire. Pour autant, la démocratisation culturelle n’a jamais atteint ses objectifs : la fréquentation des institutions culturelles subventionnées est toujours majoritairement le fait des classes cultivées excluant de facto une grande partie de la population d’un important pan de service public. Si les pratiques culturelles des Françaises et des Français sont multiples et s’élargissent, celles liées à la culture publique connaissent en revanche peu de transformations, voire un creusement des écarts comme « la fréquentation des lieux patrimoniaux (musées, expositions, monuments) : les plus diplômés et les catégories socioprofessionnelles supérieures sont aujourd’hui plus encore qu’hier susceptibles de s’adonner à ces visites » ou encore « le spectacle vivant […] en moyenne plus souvent une pratique des plus diplômés et des cadres ».

Le projet social visant à amener la culture à toutes et tous est aujourd’hui pris en charge par les institutions culturelles à travers le « développement des publics ». Bien que ces nouvelles pratiques d’action culturelle produisent des effets réels sur des groupes ciblés (scolaires, femmes isolées, personnes en situation de handicap, etc.), elles restent ce que Pierre Bourdieu appelait « des entreprises de rattrapage culturel » vers une offre artistique protégée par ses barrières. Les pratiques de développement des publics n’ont ni la force de créer massivement les spectateurs de demain ni celle d’enrayer la violence symbolique produite sur les classes sociales ne disposant pas des codes nécessaires.

L’affaiblissement des idées de politique culturelle et de démocratisation culturelle laisse un secteur sans boussole qui semble dériver le long de ses travers. Cette situation – connue – est particulièrement saillante aujourd’hui, parce que la culture ne participe que de manière lointaine à la transformation profonde de la société que nous impose le siècle, et que le complexe historique et politique français immédiat crée une situation où le populisme peut s’attaquer à la culture subventionnée et trouver un écho dans les classes populaires. Il paraîtrait légitime que la culture subventionnée soit aux avant-postes pour mener le combat contre le réchauffement climatique et pour la justice sociale. Mais il n’en est rien, le monde culturel d’aujourd’hui conçoit la politique comme un simple élément de discours, une esthétique, sans que cela ne se traduise par un impact significatif et déterminant sur le corps social.

Deux images. La première, symbolique certes, mais qui manifeste avec clarté la menace qui plane : en juillet 2022, un incendie se déclenche au sud d’Avignon recouvrant en pleine après-midi la cité des Papes d’un voile de fumée menaçant suivi d’une pluie de cendres, dans la parfaite impuissance et indifférence des festivaliers de la plus grande manifestation de théâtre de France. La seconde, plus nette encore : en juillet 2023, le festival s’ouvre dans la foulée des émeutes consécutives à l’assassinat de Nahel Merzouk le 27 juin par un policier. Comme chaque année, la rue de la République se remplit chaque soir de spectacles de rue spontanés attirant une foule compacte composée semble-t-il des habitantes et des habitants d’Avignon, en partie issue de l’immigration. Au bout de la rue, plus haut, la bonne société des festivaliers du « In » se presse dans la Cour d’honneur du Palais des Papes pour assister à une représentation du spectacle phare de la programmation. D’un côté la rue, de l’autre la Cour d’honneur. Deux pratiques culturelles, deux populations distinctes. Au centre, près de 17 millions de subventions publiques attribuées au Festival d’Avignon, pour une durée de trois semaines, sur un territoire restreint, qui ne saura que reproduire, voire exacerber la ségrégation de la population française. Ce constat n’est pas nouveau mais la crise déclenchée par les révoltes urbaines a, cette année-là, rendu plus « manifeste ce qui est caché ». Un état de fait qui devient de plus en plus intenable tant il participe à la sédimentation de violence dans certaines couches délaissées de la population.

D’où provient l’échec ?

Pourquoi la culture subventionnée est-elle politiquement inopérante, là où le discours (des œuvres, des artistes, des institutions, du politique) affiche un volontarisme contre les maux du monde et pour les plus fragiles ? Pourquoi la culture subventionnée crée-t-elle de l’exclusion là où le discours exprime une volonté de rassemblement ? Un élément de l’équation artistique et culturelle semble n’être que rarement remis en question : la création.

Si l’on schématise, la mission phare que s’est donnée la culture publique française est celle d’une mise à disposition des œuvres pour le plus grand nombre, sur tout le territoire, au travers notamment des théâtres, des musées, etc.

Une part des lieux et des pratiques culturelles qui prennent racine dans l’Histoire, ainsi que les œuvres du répertoire, portent en elles « l’idée d’une culture française fixe et atemporelle ». La symbolique d’une partie des lieux, des pratiques culturelles et des œuvres transportent de manière immémoriale le contexte historique et politique de leur création, induisant ainsi par leur perpétuation, une réplique des schémas de domination antérieurs. L’exemple le plus net en la matière est l’Opéra national de Paris. Le lieu tout d’abord : le palais Garnier, construit sous l’impulsion de Napoléon III, dispose d’une salle de spectacle à l’italienne où l’organisation spatiale des fauteuils reflétait – et reflète encore – la hiérarchie sociale. Ensuite, l’Opéra était « lieu d’excellence artistique […] mais aussi lieu de pouvoir, où les élites politique et économiques se retrouvaient – et se retrouvent encore – pour socialiser tout en jouissant des plaisirs procurés par un art total ». Enfin, pour ce qui concerne la dimension artistique de l’Opéra, un aspect montre bien la logique à l’œuvre : « le ballet fut conçu […] comme le “corps du roi”, qui se donnait à voir dans sa pureté et sa perfection », une homogénéité qui reste la norme, bien qu’en 2023, Guillaume Diop ait été le premier danseur noir nommé « Danseur Étoile ».

Sur un autre versant, la création contemporaine est entraînée dans une tendance générale qui valorise la recherche et l’innovation esthétique pure. Bien que celle-ci soit très vaste et ne puisse se réduire à un seul courant, on constate qu’une place très importante est donnée à des œuvres pour leur valeur formelle, leur auto-référentialité, jusqu’à parfois égarer la création dans des œuvres rendues « indisponibles » au public et ineffectives sur le plan politique, comme cela a été démontré dans le cas de l’art contemporain par Baptiste Morizot et Estelle Zhong Mengual. Geoffroy de Lagasnerie parle lui d’une volonté d’énigmatisation de l’art comme « idéologie très puissante dans le champ artistique qui prend souvent la forme d’une dévalorisation de la pédagogie, de l’explicite, du dit et qui consiste à poser que, pour être dotée de valeur, une œuvre doit nécessairement ne pas dire ce qu’elle dit, ou ne pas le dire directement, ou le cacher, ou simplement l’évoquer ». Dans le champ du théâtre par exemple, il est fréquent de voir des spectacles dont le sujet est pour tout ou partie le théâtre lui-même, joués devant un public de gens du théâtre.

Dans le même temps, la France ne s’est jamais entièrement affranchie de que ce Pierre Bourdieu dénonçait comme « l’idéologie de l’œil neuf », idée selon laquelle la simple confrontation – sans médiation, ni formation aux codes – avec une œuvre était la manière d’accéder à sa compréhension immédiate et totale.

Au-delà de la question de la création et de sa diffusion, l’enseignement artistique est lui aussi empreint d’une conception très française de la culture. Les conservatoires publics, bien que nombreux et dispensant un enseignement de qualité à des tarifs accessibles, sont comme le décrit Raphaël Imbert, directeur du Conservatoire à Rayonnement Régional de Marseille, « issus d’une pensée politique culturelle qui assument son sens de la hiérarchie et des priorités, définissant ce qu’est le beau et ce qu’il n’est pas, pour le peuple et à la place du peuple ».

Le système culturel produit ainsi à travers différentes logiques combinées, dont seuls quelques éléments de surface sont mis au jour ici, un complexe hermétique qui ne permet pas une rencontre avec les publics de toutes les classes sociales. Les attributs de cet hermétisme sont contenus et véhiculés par les notions étendards d’excellence artistique et d’exigence artistique, « fondée sur les normes que partage le petit milieu des spécialistes de l’art », et qu’il devient ainsi urgent d’interroger.

Pour un aggiornamento artistique et culturel

Pour faire advenir un aggiornamento, il est nécessaire de penser les finalités d’un nouveau projet de politique culturelle, et de créer les conditions de la liberté de création nécessaires à la réalisation de ce projet. En d’autres termes, le rôle des politiques publiques de la culture ne doit plus être en premier lieu de garantir la viabilité des filières économiques, mais de donner aux artistes l’espace nécessaire pour que s’épanouisse un projet de société. Si le politique ne doit pas intervenir directement sur le champ de la création, il doit néanmoins créer les conditions de la mutation artistique et culturelle.

Dans son ouvrage Quand l’art chasse le populaire, la sociologue Marjorie Glas donne un exemple éclairant. Elle montre comment une politique publique, en l’occurrence l’institutionnalisation de l’art dramatique après 1945, a progressivement modifié le rapport au public du théâtre populaire pour qui jusqu’alors, la fonction sociale du théâtre supplantait les enjeux purement esthétiques. Ainsi, elle montre que la construction de salles sur le territoire, qui a sédentarisé les troupes, a participé à « l’amoindrissement du rôle du public dans les logiques de consécration », « favorisé la conception de spectacle plus complexes », entraîné la « séparation des fonctions de création et de relation au public » ou encore « affaibli la logique de tournées en milieu rural ». C’est ce type d’effets de bord des politiques publiques menées qui agissent sur le champ artistique qu’il faut questionner pour repenser en profondeur les objectifs de la création artistique subventionnée.

Aujourd’hui, la création encouragée par les institutions subventionnées a pour premier impératif l’exigence artistique, dont nous avons vu précédemment les inclinaisons sous-jacentes. On retrouve régulièrement d’autres intentions artistiques valorisées comme la « prise de risque », qui soutient les démarches artistiques expérimentales, ou encore la protection de la « diversité des esthétiques » qui favorise la multiplicité des formes disciplinaires et transdisciplinaires, etc. En d’autres termes, les pouvoirs publics et la rhétorique ambiante « consacrent la prééminence de la recherche artistique au détriment de la réception des spectacles ».

L’exigence artistique est ainsi la formule qui véhicule la priorité absolue donnée à l’innovation esthétique. Pour parvenir à modifier cette injonction tacite, le travail à mener est de proposer une nouvelle hiérarchie et une recomposition de l’échelle de valeur des intentions artistiques. Cette démarche revient à questionner la vocation de la création qui est subventionnée notamment en redéfinissant les critères qui amènent à la consécration institutionnelle.

Quelle serait ainsi la nouvelle nomenclature des intentions artistiques à défendre ? Le basculement ontologique majeur à opérer (qui n’est pas seulement l’apanage du monde artistique et culturel mais probablement de toute la société) serait celui d’une « transformation de la conception du monde et de l’expérience depuis une perspective centrée sur les choses, vers une perspective focalisée sur les relations entre les choses ». En s’appuyant sur cette philosophie et en l’appliquant à l’art, il s’agirait de renoncer à la valeur formelle des œuvres et la recherche esthétique pure comme totems (perspective centrée sur les choses). Ce qui reviendrait à créer et consacrer des œuvres pour leur capacité à nouer des relations avec le public (perspective focalisée sur les relations entre les choses) et non pour leur puissance de distinction. En d’autres termes, que la capacité d’une œuvre à entrer en contact avec la population soit l’intention artistique première, avant l’innovation esthétique. Pour reprendre les termes de Baptiste Morizot à propos du vivant : un art de vivifier les relations, de sublimer le rassemblement.

Sur cette base, il conviendrait de fonder une nouvelle éthique de la création qui aurait pour intention première non plus l’exigence artistique ou l’excellence artistique, mais une intelligence artistique, une notion nouvelle qui acterait un changement de perspective, à travers laquelle priment les intérêts des relations créées par les œuvres elles-mêmes avec la population.

Les protocoles artistiques pour y parvenir restent à inventer. Nous pouvons néanmoins observer ici et là des artistes qui souhaitent repenser leur manière de créer sans que cela n’ait été encore largement systématisé. Le sociologue Philippe Coulangeon a conceptualisé une piste de protocole à travers ce qu’il appelle l’« éthique de la réciprocité »dans laquelle la création doit puiser à la fois dans la culture savante et dans la culture populaire, manière efficace selon lui que les classes populaires puissent s’intéresser au répertoire savant, et inversement. Cette conception induit de communiquer à partir des points-clés partagés entre les cultures des populations et des classes sociales. Un exemple symbolique est celui de l’artiste Clément Cogitore qui a mis en scène Les Indes Galantes de Jean-Philippe Rameau à l’Opéra Bastille, avec le concours des danseurs de krump de la chorégraphe Bintou Dembélé. Autre tentative réussie avec Pour sortir au jour, un solo du chorégraphe et danseur Olivier Dubois prenant la forme d’un peep-show voire d’un one man show dans lequel il danse des extraits des grandes pièces chorégraphiques qu’il a interprétées, tout en livrant une réflexion puissante sur son corps et l’histoire de la danse.

Si la refonte de la manière de penser la création est le point nodal, toute la périphérie de la création doit être interrogée, notamment la manière de présenter ou de diffuser les œuvres parfois enserrées dans des pratiques séculaires. La reconfiguration de la réception des œuvres est là aussi un enjeu politique majeur. L’exemple des musées est très parlant : « le musée se visite en silence, dans un recueillement propre à une conception de la réception de la beauté qui sied à la culture bourgeoise », une dévotion qui perdure malgré les efforts de certains musées à proposer davantage d’interactivité dans la muséographie. À l’inverse, l’exposition Foire foraine d’art contemporain présentée au CENTQUATRE-PARIS en 2022 s’était donnée pour mission de repenser entièrement les codes de l’exposition d’art contemporain en puisant dans les codes de la fête foraine, manifestation populaire par excellence. Les visiteurs étaient invités à « jouer » avec les œuvres (possibilité de rentrer en contact physiquement avec elles), ils pouvaient accéder aux différentes salles de l’exposition de manière ludique avec des jetons comme pour entrer dans une attraction, etc.

Conclusion

Cet aggiornamento artistique et culturel s’apparente ainsi à la naissance d’une nouvelle politique culturelle qui doit s’étendre et agir le long du continuum justice climatique, justice sociale. Un projet fort qui doit activement participer à étendre la « gamme trop étroites de sentiments, d’arts, d’œuvres, de thèmes, d’images, de récits » pour réussir à contrer le « désalignement les affects » de la population, tâche essentielle pour réussir la transformation écologique de la société. Un projet qui a aussi pour tâche de créer de nouvelles zones artistiques et culturelles à même de véritablement rapprocher toutes les classes sociales. Le temps presse car les populistes nationalistes progressent partout en Europe et particulièrement en France. La suppression de subventions à la culture en Rhône-Alpes est à la fois un signe annonciateur, la marque visible de l’incompréhension profonde entre le monde de la culture et la population mais aussi la première offensive d’une politique décomplexée et ostentatoire de coupes budgétaires en direction du secteur de la culture. Il ne s’agit plus aujourd’hui d’objecter des arguments moraux face à ces adversaires mais de traiter les causes du malaise et de fonder un nouveau projet de politique culturelle. Une riposte au populisme anti-culturel est possible. Une auto-réquisition générale des forces vives du monde artistique et culturel est nécessaire pour proposer de nouvelles perspectives à la création artistique et mettre fin à l’exclusion culturelle française.

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Victorien Bornéat