Édito

Glissement à droite ?

Publié le 15 septembre 2023
Après l’Italie, un autre pays européen risque-t-il de voir arriver au pouvoir un parti d’extrême-droite ? Les tendances antilibérales revendiquées du parti Droit et justice (PiS) en Pologne ou de Victor Orban en Hongrie peuvent-elles inspirer d’autres partis ? La tentation de mener une coalition de droite avec des partis populistes, comme c’est le cas en Suède, peut-elle faire tache d’huile sur le continent ? La Grande Conversation poursuit ses interrogations sur la poussée de l’extrême-droite en Europe.
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Parmi les pays européens qui vivent une poussée de l’extrême-droite, les Pays Bas sont un cas d’école, Sander Tordoir analyse cette implosion politique néerlandaise. Au-delà des avancées du populisme de droite dans différents pays européens, on peut se demander si l’Europe est devenue un terrain d’expression nouveau pour l’extrême-droite. Pendant longtemps, une alliance européenne des extrême-droites semblait une contradiction dans les termes. Les partis nationalistes, par nature, dénigraient le projet européen et trouvaient entre eux peu de points communs pour se rapprocher. Bruxelles était une cible facile, qui suffisait à masquer les désaccords de fond.

Pourtant, relève Hans Kundnani dans une note cette semaine, leur stratégie est en train de changer. D’une part, la convergence à l’œuvre dans de nombreux pays entre les forces politiques conservatrices et les partis d’extrême droite change les équilibres européens, même si une alliance au sein du Parlement européen actuel reste exclue. D’autre part, les extrêmes droites ont développé un nouveau discours sur l’Europe, qu’il ne s’agit plus de quitter mais de transformer de l’intérieur au nom de la sauvegarde d’un mode de vie propre à la « civilisation » européenne, qu’elles présentent comme menacée de nombreux périls extérieurs. 

L’attaque russe contre l’Ukraine a contraint les partis d’extrême droite, qui accordaient en général un grand crédit à Moscou, à redéfinir leur position vis-à-vis des priorités de sécurité européenne. Le retour de la guerre sur le continent a aussi changé la perception de l’environnement proche et ouvert un accord pour la candidature ukrainienne à l’adhésion. C’est la première fois qu’un pays candidat est aussi un pays en guerre. La prochaine vague d’élargissement qui se profile est donc très différente des précédentes, nous rappelle ici Sylvain Kahn, ouvrant une discussion qui ne fait que commencer sur l’avenir de l’UE. 

Parmi les chantiers importants de régulation menés à l’échelle européenne, les textes récents sur les acteurs du numérique (Digital Services Act et Digital Market Act) montrent qu’une action publique est possible dans ce secteur. Un scénario alternatif à la domination de quelques grands opérateurs privés est présenté ici avec l’exemple de l’India stack. Ce projet mené en Inde par des chercheurs et des institutions indépendantes montrent qu’on peut imaginer une infrastructure numérique publique qui ne soit ni contrôlée par l’Etat ni dépendante des initiatives des entreprises privées. Cet exemple indien montre à quelles conditions on peut remettre le numérique au service du bien commun. 

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Comment refaire du commun ? C’est aussi, de manière inattendue, la question que le chercheur spécialiste des questions urbaines Carlo Ratti voit au centre des deux films à grand succès de cet été, Barbie et Oppenheimer. Les personnages centraux de ces deux histoires, au demeurant fort différentes, sont en effet, selon l’auteur, les deux utopies urbaines de Los Alamos et de Barbieland. A quelles conditions l’entre-soi urbain – celui des savants ou celui des mannequins lisses – peut-il produire de la découverte et de l’invention ? 

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