Proposer un modèle à la française d’aide à mourir : c’est l’ambition du projet de loi sur la fin de vie qui arrive au Parlement. Un texte pragmatique, qui dessine une procédure fortement encadrée pour cet acte de soin ultime. Un texte de compromis, qui cherche l’équilibre dans un débat aux polarités fortes. Mais comment sécuriser ce compromis au Parlement pour que ce texte organise concrètement la meilleure aide possible pour les patients en fin de vie ? La Grande conversation place au cœur du débat une réflexion à plusieurs voix sur les conditions d’une aide qui soit le plus justement fraternelle.
Instaurer une aide à mourir pour les patients qui le demandent : la discussion parlementaire s’ouvre à l’Assemblée lundi 13 mai sur le projet de loi du gouvernement. En amont, les députés ont auditionné les principaux acteurs et experts du sujet, dont Marisol Touraine, ancienne ministre de la santé, qui retrace ici pour La Grande conversation les positions qu’elle a partagées.
Emmanuel Macron a dévoilé le 10 mars 2024 les contours du projet de loi pour une aide à mourir très encadrée. Le texte sera examiné au Parlement à partir du 27 mai. Outre une stratégie de renforcement de l’offre de soins palliatifs, il choisit la voie du suicide assisté : le Gouvernement entend tracer une ligne de crête entre les tenants d’un droit plus ambitieux incluant l’euthanasie, et les conservateurs qui récusent toute aide médicale à mourir. Au nombre de ces derniers, la Fondapol publie deux notes qui critiquent les choix de l’exécutif ; mais les arguments avancés reposent sur une lecture erronée des données et expriment des présupposés idéologiques marqués.
« Pro et contra » : de multiples arguments sont échangés pour ou contre une prochaine évolution de la loi sur la fin de vie. Les arguments s’opposent parfois terme à terme, sans faire évoluer les convictions. Pour faire avancer le débat, il ne suffit pas de donner ses raisons, il faut aussi adopter une approche fondée sur l’empathie et l’empirisme, qui pourrait contribuer à dépasser les clivages.
La fin de (la) vie est à l’agenda de ce quinquennat. Le sujet comporte deux volets, dont hélas, parce qu’ils motivent chacun de puissants militantismes de fait antagonistes, le débat public peine encore à penser la complémentarité essentielle: la possibilité d’être aidé à mourir d’une part, et le développement des soins palliatifs d’autre part. Dûment traités de façon conjointe par la Convention citoyenne sur la fin de vie que le Président installait il y a un peu plus d’un an, ces deux volets feront ensemble l’objet d’un projet de loi dont l’examen au Parlement ne cesse d’être repoussé par l’exécutif. En attendant, les pistes pour développer les soins palliatifs au sein d’une nouvelle stratégie décennale viennent de faire l’objet d’un rapport très attendu. Elsa Walter, journaliste et bénévole auprès de personnes en fin de vie, détaille ici l’intérêt du changement de paradigme dessiné dans ce rapport, mais plaide aussi pour aller résolument plus loin, y compris en regardant en face le continuum nécessaire qu’il faudra construire entre les soins palliatifs et la future possibilité d’être aidé à mourir.
La Convention citoyenne sur le climat n'est plus une expérience isolée. Début avril, la Convention citoyenne sur la fin de vie a rendu ses travaux. En quoi cette deuxième expérience se différencie-t-elle de la première ? Que nous apprend-elle sur les conditions de réussite de cet exercice ? Quelles leçons à retenir pour la suite ? Claire Thoury, présidente du comité de gouvernance de la Convention citoyenne sur la fin de vie dialogue ici avec Thierry Pech qui avait assuré la co-présidence du comité de gouvernance de la Convention citoyenne sur le climat.
Les conventions citoyennes peuvent-elles renforcer le lien démocratique ? Pour les 184 citoyens tirés au sort qui viennent de remettre leurs conclusions sur la fin de vie au Président de la République, la réponse est oui. « Il est temps que la parole citoyenne soit pleinement entendue et prise en compte » : ainsi concluent-ils le manifeste qui clôt leurs quatre mois de délibération. Après des débats dont chacun salue aujourd’hui le sérieux, la majorité de la Convention s’est prononcée en faveur d’une ouverture à l'aide active à mourir. Comment la mettre en œuvre ? Le rapport conclusif de la convention détaille un nuancier de scénarios possibles dont le débat public, le Gouvernement et le Parlement doivent à présent s’emparer.
L’encadrement de la fin de vie va-t-il connaître une évolution législative en France ? Si une aide active à mourir devait être légalisée, quels en seraient le périmètre, les modalités, les contrôles ? François Blot propose de réfléchir à plusieurs scénarios. Outre le statu quo, et au-delà d’un monde rêvé mais inaccessible, il imagine deux voies, l’une pouvant être définie comme radicale mais stable, l’autre comme prudente mais évolutive.
Dans le débat sur la fin de vie, les soins palliatifs et l’aide médicale à mourir, un pan du réel reste encore dans l’ombre pour beaucoup d’entre nous : quelles sont concrètement les pratiques médicales, les produits, les gestes qui permettent à la médecine d’accompagner le malade jusqu’à la mort ? Loin de l’armoire à poisons taboue que certains pourraient encore fantasmer, François Blot, réanimateur, dissèque ici l’arsenal des molécules qui, de l’anesthésie-réanimation jusqu’à l’euthanasie en passant par les soins palliatifs, permettent, selon des protocoles précis d’associations et de dosages dont les médecins sont familiers, de sauver des vies aussi bien que d’en faciliter l’issue.
Dans ce texte volontairement personnel, Bernard Poulet, journaliste, démonte bon nombre des arguments que font valoir les opposants au suicide assisté et à l’euthanasie. Abandonner les malades qui demandent de l’aide à leur propre sort devant la mort, montre-t-il, c’est accepter d’aller à l’encontre des valeurs mêmes qui sont mobilisées pour le justifier : références au christianisme, à l’autonomie, à la vulnérabilité, ou encore au serment d’Hippocrate, s’avèrent finalement instrumentalisées à mauvais escient. Le respect du choix difficile qu’il revient à chacun de nous d’assumer devant la mort : tel est, selon lui, le principe cardinal qui devrait s’imposer.
François Blot, réanimateur, analyse ici les positions exprimées récemment dans la Grande Conversation par la juriste Martine Lombard, puis, en réponse, par Claire Fourcade, présidente de la Société française de soins palliatifs. Il propose une relecture de leurs arguments qui révèle un point aveugle du débat : on ne saurait critiquer, comme c’est parfois le cas dans le cadre de la défense des soins palliatifs, l’aide médicale à mourir comme une trop grande technicisation de la mort qui transgresserait sa dimension intime et tragique, car l’approche palliative, de son côté, n’est pas moins confiante dans la maîtrise technique, si ce n’est de la mort, au moins de l’agonie.
Mélanie Heard s’efforce de distinguer ici les différentes formes que peut revêtir l’aide active à mourir : euthanasie, suicide assisté sur le « modèle oregonais » ou suicide assisté sur le « modèle suisse ». Derrière ces modèles se cachent diverses conceptions de la liberté des individus et de l’implication des tiers. C’est à la lumière de ces distinctions que Mélanie Heard identifie les contours d’un « choix de fraternité ».
Pour animer la conversation démocratique sur la fin de vie dans le cadre de la Convention citoyenne actuelle, la Grande Conversation donne la parole à tous les acteurs qui souhaitent faire vivre l’échange des idées. En réponse au texte de Martine Lombard que nous avons publié le 3 novembre dernier, intitulé « Faut-il encore opposer soins palliatifs et aide active à mourir », la présidente de la Société française d’accompagnement et de soins palliatifs (SFAP), Claire Fourcade, propose ici une contribution centrée sur le tragique de la mort. Elle s’interroge, à la lumière de la question posée à la convention citoyenne quant au caractère suffisant ou non du cadre législatif actuel, sur l’étendue des responsabilités et des capacités de l’Etat à accompagner la mort et le découragement de ceux qui souffrent.
Le texte de loi encadrant la fin de vie, dont la dernière révision date de 2016, a recueilli un large consensus. Un certain nombre de malades, cependant, vivent des moments douloureux sans trouver de réponse à leur situation dans le dispositif juridique actuel. Que peut-on opposer aux personnes en phase avancée ou terminale d’une maladie incurable qui demandent une aide médicale à mourir ? Existe-t-il des arguments pour leur refuser l’accompagnement ultime qu’ils réclament ? Et sinon, quelle réponse peut-on leur apporter et quel serait le rôle des soignants dans ce cas ?
Le dernier avis du Comité consultatif national d’éthique sur la fin de vie s’interroge sur l’évolution de la loi actuelle. Il recommande fortement le développement de l’offre de soins palliatifs et, plus largement, le développement d’une culture palliative. Quelles sont les propositions en présence et quelles sont leurs nuances fondamentales ?
Une difficulté particulière du débat public sur la fin de vie vient des malentendus sur le vocabulaire. Qu'il soit médical ou juridique, il présente une dimension technique qui appelle des éclaircissements. Mais le vocabulaire est aussi un objet de désaccords. Le propos de cet essai de lexique est de faire apparaître, pour quelques-uns des termes les plus visibles dans le débat, les tensions et controverses que recouvre leur usage dans les différents plaidoyers en présence.
Quelles sont les positions en présence dans le débat qui s’ouvre sur la fin de vie ? Repérer les arguments en présence est la première clé pour construire les questions qui nourriront, dans les mois à venir, le débat public et les travaux de la convention citoyenne. François Blot, réanimateur à Gustave Roussy, fleuron de la prise en charge du cancer, se livre ici à un recensement sans parti-pris des arguments aussi bien pour que contre une évolution de la loi. Ce faisant, il propose un chemin dans la série des dilemmes que ce débat révèle : des enjeux pratiques aux conflits de valeur, il montre que la délibération ne pourra s’organiser qu’au prix d’un effort méthodique de distinction et d’articulation des différentes questions que la convention citoyenne puis, le cas échéant, les parlementaires, auront à trancher.
Martine Lombard propose ici d’affiner pour La Grande conversation notre compréhension des arguments qui opposent les tenants du développement des soins palliatifs, opposés à toute modification de la loi, aux défenseurs d’une dépénalisation de l’aide active à mourir. Pour le grand public, et singulièrement pour les patients qui se savent en fin de vie, cette opposition entre deux camps, montre-t-elle, n’a guère de sens. Avec le souci d’éclairer le débat qui s’ouvre et la réflexion que conduira la convention citoyenne que le Gouvernement a souhaité installer et dont les travaux commencent le mois prochain, elle propose quelques clés pour une lecture mieux avertie des argumentaires en présence.
Une Convention citoyenne se réunira dans les mois qui viennent pour débattre d'une éventuelle évolution de la loi sur la fin de vie. Sur un sujet aussi difficile, il est crucial que le débat soit organisé de manière à assurer une délibération collective rigoureuse. C'est pourquoi la formulation de la question qui sera soumise aux citoyens est essentielle.